Texte :
1. Curieux : la chose et son mystère
La chose est posée là,
Dans un recoin sombre et isolé.
Dia la trouve étrange.
Elle regarde dessus, derrière, sur le côté, de travers, de face.
Elle la touche, pour voir ce qui se passe.
La chose ne bouge pas.
Alors elle l’attrape, et la soulève.
Dessous, il y a un mystère.
Il était caché dans le creux de la chose.
Et, maintenant que Dia l’a découvert, il reste tout recroquevillé.
Dia est intimidée. Elle n’ose plus bouger.
Le mystère ne bouge pas non plus.
Alors, Dia tend la main pour l’attraper, mais brusquement le mystère se déploie et disparaît.
Il ne reste plus que la chose et Dia ne la trouve plus tellement intéressante.
2. Rêveur : l'attraction terrestre
Les nuages se déplacent lentement dans le bleu du ciel.
Moun les observe allongé dans l’herbe, la tête contre le sol.
Il y en a des petits, des gros,
Des qui s’étalent en faisant des traînées
D’autres très compacts qui ressemblent à des animaux
Certains sont plus près, d’autres plus loin.
Soudain, Moun est pris d’une inquiétude :
Si la Terre s’arrêtait de tourner...
Il tomberait dans le ciel !
Et au delà du ciel, il continuerait de tomber dans l’espace tout noir…
Moun s’agrippe à l’herbe aussi fort qu’il peut.
Ou alors, dans sa chute, il rencontrerait un nuage moelleux
Et confortablement installé, il pourrait contempler le monde depuis là-haut.
Cette idée lui plaît beaucoup.
Puis, quand la Terre se remettrait à tourner,
Il serait de nouveau attiré au sol, comme avant.
3. Solitaire : le double
Lub s’ennuie tout seul.
Il cherche de la compagnie.
Autour de lui, rien ne l’intéresse.
Il connaît tous les livres par cœur.
Les jouets ont l’air triste et fatigué.
Dehors le ciel est encombré de gros nuages menaçants, et le vent arrache des feuilles aux arbres.
Enfin, il rencontre le miroir du salon.
Il sait bien que c’est lui dans le miroir.
Mais cela fera l’affaire en attendant.
Il tourne sur lui-même.
Il disparaît et réapparaît en poussant de grands cris.
Il s’entraîne à faire ses plus beaux sourires.
Il se plaît.
Puis il fait le concours des plus horribles grimaces.
Tout à coup un monstre apparaît dans le miroir.
Lub s'enfuit
Et se cache loin du monstre.
Il n’ose plus bouger.
4. Patient : la relation
Tila reçoit un arbre en cadeau.
Elle choisit le meilleur emplacement pour lui dans le jardin.
Il est bien plus petit que les autres arbres.
Tila enfonce des bâtons dans le sol tout autour.
Personne n’a le droit d’entrer, sauf elle.
Elle lui donne à boire de temps en temps.
Elle s’assoie à côté de lui. La tête contre son tronc.
Elle lui raconte des histoires qui lui arrivent.
Elle accroche des couleurs à ses branches.
Elle enterre ses secrets près de lui.
Elle lui fait des câlins.
Mais l’arbre ne répond jamais.
Tila le trouve ennuyeux, alors elle ne vient plus le voir.
Elle oublie qu’il existe.
Plus tard, elle joue dans le jardin ensoleillé.
Elle retrouve son arbre abandonné.
Dans le sol, les bâtons ont disparu au milieu des herbes folles.
Les couleurs, parmi les feuilles, ont perdues de leur éclat.
Elle voit alors une forme rouge vif qui pend lourdement à une branche.
C’est un abricot bien mûr, tout seul.
Il est sucré, tendre et chaud, hum…
Tila trouve que c’est le meilleur fruit de la Terre.
5. Concentré : le vide
Omi aime passer du temps à la bibliothèque.
Il voudrait bien tout comprendre,
Avoir des réponses à toutes les questions.
Quoi, pourquoi, comment, combien, quand, qui et où?
Mais il lui manque une question, il en est sûr.
Il cherche dans sa tête.
Quoi, pourquoi, comment, combien, quand, qui et où ?
Quoi, pourquoi, comment, combien, quand, qui et où ?
Quoi, pourquoi, … Oui mais encore
Omi se concentre davantage
Il plisse les yeux et creuse dans sa tête, le plus profond possible, mais rien ne vient.
C'est alors qu'il rencontre le vide.
Une mouche passe près de son oreille,
Bzzzzzzzzzzz Bzzzz zzzzzzzzzzzz...
Le son de la mouche remplit tout le vide.
Omi n’arrive plus à se concentrer.
Il ouvre un œil discrètement.
Il attend, immobile.
La mouche se pose enfin près de lui.
Il se jette sur elle, mais elle est plus rapide et s’envole vers le plafond.
Il ne s’avoue pas vaincu pour autant.
Il court chercher l'escabeau pour pouvoir l’atteindre.
Lorsqu’il revient, la mouche a disparu.
6. Chasseur : la beauté éphémère
L’été, les libellules, graciles et rapides, quadrillent la surface des étangs.
Et les papillons de toutes les couleurs virevoltent parmi les fleurs parfumées.
Nine est tapie dans l'herbe.
Elle admire leur beauté dans l'éclat d'un rayon de soleil.
Nine a appris à les attraper.
Elle connaît plusieurs techniques
Avec les doigts c’est difficile, mais c’est aussi plus réjouissant.
Il faut s’approcher discrètement,
Tendre la main lentement,
Et lorsque le papillon referme ses ailes, hop,
Nine les attrape entre le pouce et l'index.
Puis elle glisse le papillon dans un bocal,
Et l’observe un moment à travers la paroi de verre.
Les ailes du papillon sont douces et fines,
Elles déposent une trace brillante et colorée sur les doigts.
C’est pourquoi Nine préfère les capturer ainsi.
Mais elles sont fragiles aussi.
Après un certain temps dans le bocal,
Le papillon s’abîme les ailes,
Et elles ne sont plus belles du tout.
Alors Nine le laisse s'envoler et se cache parmi les herbes,
A l’affût d’un nouveau spécimen.
7. Pressé : le passage
Dess a très envie de faire pipi,
Elle cherche un petit coin discret pour se soulager.
Elle se poste entre deux voitures :
Trop risqué, d’un côté le trottoir, de l’autre la route,
Des passants pourraient la surprendre.
Un peu plus loin, elle repère un fourré au coin d’une rue.
Elle se faufile derrière un buisson.
Le fourré est bourdonnant d’insectes et Dess n’aime pas tellement ça.
Au moment où elle s’apprête à baisser sa culotte,
Elle entend des feuilles qui crissent derrière elle.
Prise de panique, elle bondit hors du fourré.
L’envie se fait très pressante à présent.
Dess se précipite vers une magnifique bouche d’égout au pied d’un mur.
Elle s’accroupit sans se poser davantage de questions,
Et admire le jet fumant filer tout droit dans le trou noir.
Les yeux fermés, Dess attend le petit clapotis du jet qui atteint le fond du trou,
Mais aucun son ne lui parvient.
Elle se penche et cherche du regard,
Le trou n’a pas de fond.
Ce doit être un de ces passages secrets qui mènent dans un autre monde.
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